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Ma Part d’inventaire

Marie-Noëlle Lienemann

30 août 2002, par Laurent Pelvey

Ramsay 2002

Les commentaires autour du livre de Marie-Noëlle Lienemann (Ma part d’inventaire, Ramsay) se sont focalisés sur les critiques personnelles contre Lionel Jospin. De notre côté, laissons à ses camarades le soin de juger si l’ancien Premier ministre était ou non "un pessimiste entouré d’autistes", qui "donnait l’impression d’avoir un ego hypertrophié" et était "un peu court pour être président"... Notons toutefois que Marie-Noëlle Lienemann exprime parfois tout haut ce que d’autres dirigeants socialistes pensent tout bas, notamment à propos du retrait de Lionel Jospin : "La dignité ce n’est pas abandonner son camp en rase campagne". Il est vrai que sans ces quelques phrases acerbes nous n’aurions certainement pas entendu résonner la part de vérité de Marie-Noëlle Lienemann. Mais méfions nous d’une lecture réductrice du livre, qui permet à la gauche libérale bien-pensante de contourner les problèmes de fond soulevés.

L’ancienne secrétaire d’Etat au logement critique d’une part l’orientation politique de feu le gouvernement de "gauche plurielle" : "De concession en concession, la gauche gouvernementale est arrivée à un véritable alignement sur le libéralisme. La qualifier de "social-libéral" est bien généreux tant la part du "social" se réduit à la portion congrue". Plus inattendu, Marie-Noëlle Lienemann nous révèle d’autre part sa foi en la grandeur de la France : "J’ai assez mal vécu la façon dont Lionel Jospin a traité la nécessaire reconnaissance de l’implication de la France, en l’occurrence de l’Etat français, dans les crimes de Vichy. Il n’a pas suffisamment fait la distinction entre la République et la France occupée devenue l’Etat français (...) D’une certaine façon, pour Lionel Jospin, la continuité des institutions dites légales et le territoire comptent davantage pour fonder l’identité du pays que le projet politique qui sous-tend l’unité nationale, à savoir la République française. Et, au fond, cette banalisation de la France qui serait un Etat comme les autres ne correspond pas, de mon point de vue, à cette "certaine idée de la France" que l’on peut attendre d’un président de la République." Et à ceux qui se demandent si elle serait subitement devenue gaulliste, Marie-Noëlle Lienemann répond que "la volonté de contrecarrer la puissance américaine et d’affirmer un fort rayonnement de la France n’est pas l’aspect le moins attractif du gaullisme."

Si nous formulons exactement les mêmes critiques à l’encontre de la droite libérale et de la gauche libérale, il n’en reste pas moins que la solution proposée par Marie-Noëlle Lienemann nous semble une impasse : la fusion du PS et du PCF afin de former "un grand parti socialiste et populaire". Il est en outre savoureux de voir Marie-Noëlle Lienemann critiquer l’"esprit de système trotskiste" de Lionel Jospin, lorsqu’on constate que la plupart de ses camarades du courant de la Gauche Socialiste au sein du PS sont issus du trotskisme (Julien Dray, Jean-Luc Mélenchon, Gérard Filoche). Ou encore de lire sous la plume de cette ancienne rocardienne que la dérive libérale du PS est "due à l’influence de la deuxième gauche" et qu’"à Matignon, l’entourage du Premier ministre était trop largement constitué d’ex-deloristes ou rocardiens." Enfin, regrettons de ne pas avoir entendu plus tôt Marie-Noëlle Lienemann s’élever, comme Philippe Séguin ou Jean-Pierre Chevènement, contre l’abandon de la République par une droite et une gauche sous l’emprise de l’Europe libérale.

Laurent Pelvey

août 2002

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