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A mes amis !
2 mars 2012, par Jules Trevy

Vous n’êtes qu’une bande de crétins, à qui on a fait croire que le travail les enrichirait, sur le plan intellectuel tout d’abord, en ce temps là ils n’osaient pas mentir trop effrontément, ce n’est que plus tard qu’ils ont prétendu que pour plus de travail vous gagneriez plus, et votre surcroît de travail n’a fait bien entendu que les enrichir eux, il est parti augmenter honteusement les profits déjà indécents de ces salauds. Pourtant, ils ne sont pas plus intelligents que vous, loin s’en faut, pas même plus malins, ils sont juste un peu moins naïfs, plus cyniques, ils ont compris comment profiter de votre gentillesse, voire de votre faiblesse, de la lassitude qui vous rend si vulnérables. Parce que c’est de cela qu’ils ont besoin, de votre fatigue, comme cela qu’ils vous ont eus, comme cela qu’ils vous maintiennent sous leur dépendance. En faisant de vous des abrutis, métro, boulot, télé, que vous n’ayez ni le temps ni l’envie de réfléchir, ne vous ont laissé d’autres points de repère que votre salaire – qu’ils ont réduit au-dessous du strict minimum - et le loyer qui vous assure un abri indispensable pour vivre décemment. Alors ne vous restent d’autres plaisirs que ceux auxquels leurs publicités a su vous assujettir, ceux qui encore les enrichissent.
Le plaisir, eux, ils n’en ont que faire, ce qui les intéressent ce n’est pas même l’argent, ils en sont toujours au temps de l’esclavage et de la toute puissance des maîtres, ce qu’ils veulent c’est vous asservir, contrôler votre destin. Sont même allés jusqu’à voter des lois pour vous dire ce que vous deviez penser. Ils ne songent qu’à cela, le pouvoir de l’argent dont vous rêvez pour disposer à votre tour de tout tout le temps, ils savent bien qu’eux seuls le détiennent qui ont le cynisme de se payer des serviteurs. Hommes liges qui les bercent d’illusions, leur confèrent une toute puissance et les éloigne aussi loin que possible de la réalité, leur réalité à eux c’est cela, n’avoir à se préoccuper de rien, se décharger sur les autres du souci de vivre, parce qu’ils ont eu beau vous abrutir, vous avez acquis ruse et intelligence pour joindre les deux bouts, quand eux n’ont même pas idée de ce que c’est que de devoir contourner la loi, leurs lois, pour s’assurer le minimum vital !
Ils ont fait de vous, à leur corps défendant, des êtres plus malins qu’eux, mais ils vous ont totalement englués dans le quotidien, pris dans leur toile, vous êtes incapables de réagir à leur emprise, ils n’ont même plus besoin, comme les anciens esclavagistes, d’avoir recours à la peur et à la violence tant ils ont anesthésié vos cerveaux ; en un demi-siècle ils ont réussi un prodigieux retournement, digne des meilleurs équilibristes : voyant que vous alliez lâcher la religion, ne plus vous sentir tenu par ses dogmes, ils ont vite fait inventé un nouveau monde conforme à votre folie hédoniste. Ils ont compris que, vous aussi, vous aspiriez à l’insouciance et vous ont mis en tête qu’elle ne pouvait venir que du jeu, ont imaginé toutes sortes de passe-temps pour vous occuper l’esprit et remplir leurs banques par la même occasion.
Voila comment ils ont fait de vous une bande d’abrutis, abrutis par le travail qui devait être une source d’enrichissement, non pas pécuniaire, mais spirituel ! et vous vous êtes laissés prendre à cette imposture… abrutis par le cinéma et les consoles de jeux, abrutis par la tyrannie de l’instantané. Portables, internet, vous êtes faits comme des rats, incapables de prendre du recul. Et quand vous auriez eu besoin d’un peu de silence, ils ont tellement mis la pression pour faire admettre l’inadmissible, pour que le plaisir de chacun passe avant celui de tous les autres, que vous avez fini par considérer que l’espace public était une immense cabine téléphonique et que vous vous êtes vous-même piégés, enfermés dans ce brouhaha permanent dont ils avaient rêvé de vous assommer : plus besoin de ces musiques de fond supposées endormir votre vigilance de consommateur, vous avez vous-mêmes découvert le meilleur des abrutissements, l’abrutissement consenti, quémandé, dont pour rien au monde vous ne voudriez vous débarrasser parce que les amis c’est sacré, que sans eux vous auriez l’impression de ne plus vivre.
Le meilleur coup qu’ils aient réussi. Celui du téléphone mobile… et des réseaux sociaux !

Jules Trevy

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