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Le mot chien ne mord pas
22 septembre 2011, par Bouchta Essette

Quand Magritte conçut ce fameux tableau qu’il a intitulé « ceci n’est pas une pipe », il a usé de ce qu’on appelle un paradoxe pragmatique, autrement dit, il nie d’un côté ce qu’il donne l’impression d’affirmer de l’autre. Il voulait sans doute nous faire comprendre qu’entre une pipe ou une pomme en tant qu’image, mot et objet réels, il y a beaucoup de différence. Ceci n’est pas une pipe était pour Magritte, le peintre surréaliste, une manière commode de combattre la théorie de la représentation picturale. Le tableau de Magritte dont l’intitulé est marqué par la négation nous demande de le considérer dans sa dimension autotélique, c’est-à-dire qu’il n’a autre référence que lui-même, et que le langage est en définitive un mode d’expression dont il faut toujours se méfier. « Ceci n’est pas une pipe » signifie que la pipe mise sous nos yeux n’est que l’image d’une pipe et non une pipe réelle. Le langage est un moyen de culture et de communication avec lequel il faut toujours commercer avec le maximum de prudence et de méfiance. Se fier entièrement au langage tout en en usant de manière inadéquate, c’est risquer de tomber dans les rets de ses sortilèges. Phénomène ambivalent, c’est par son intermédiaire que tout se fait et se défait. Au début de l’existence était le verbe ; par son intermédiaire, Dieu dit au monde d’être et il fut. Quand on maîtrise le langage, il nous est possible de maîtriser les choses. Cela étant, est-on jamais sûr de bien maitriser le langage et ses arcanes ? N’est-ce pas très prétentieux de répondre par l’affirmative à cette question ? La maîtrise du langage n’est-elle pas un attribut exclusivement divin ? N’est-ce pas une tentative vaine pour l’homme que de chercher à s’égaler à Dieu en s’estimant être en mesure de posséder le langage, et partant de posséder le monde ? Malheureusement, tout laisse penser que les hommes, dont la plupart des actions sont dictées par des motivations passionnelles et égocentriques, ont tendance à oublier qu’ils sont des êtres faibles, des êtres incapables de comprendre les véritables limites de leurs capacités et entendement. C’est sans doute cette impérissable ignorance de l’homme qui est à l’origine des sempiternelles tragédies dans lesquelles il est condamné à vivre, car ne tirant jamais les enseignements nécessaires de l’histoire. Son incapacité à déterminer avec plus ou moins de précision ses véritables limites le pousse à se bercer d’illusions et de faussetés ; il aime le factice et la duperie, il aime mentir aux autres autant qu’il aime se mentir lui-même. Dol et duperie, mensonge et hypocrisie, crime et fourberie sont autant de qualités que véhicule son langage à longueur de la journée. Chacun a ses vérités tant qu’elles sont conformes à ses exigences et impulsions. L’homme ne dit jamais la Vérité, il dit tout au plus sa vérité, celle du moment, dont il peut se rétracter sitôt qu’elle cesse de servir ses intérêts. Et du fait que ses intérêts et ses désirs sont incommensurables, il ne cessera jamais de proclamer vrai ce qu’il combattait comme faux, et juste ce qu’il considérait comme injuste. Éternellement versatile et cyclothymique, son chant favori est la palinodie. Tantôt blanc, tantôt noir, tantôt ceci et ce à la fois jusqu’à l’épuisement. Et tout reprend da capo.

Si ces attitudes impondérables sont celles de tout un chacun, il semble qu’elles sont l’apanage surtout de ces pays dits démocratiques où les décideurs politiques, au nom d’une pseudo-égalité, ne lésinent sur aucun mot pour dire ce qui n’est pas et taire ce qui est. Le langage est pratiquement ce moyen magique avec lequel ils parviennent à adoucir un monde insipide et à aigrir des situations agréables. Les États-unis qui constituent le fer de lance des pays dits démocratiques ne cesseront jamais de nous surprendre par des comportements cocasses et un langage qui est la matérialisation parfaite de l’absurde et de la supercherie. Depuis qu’ils ont contribué activement à la création de l’État d’Israël en 1948, ils ont toujours donné le change aux Arabes, en les menant en bateau vers des rivages jamais atteints. Et depuis 1967, après l’invasion de la Palestine par Israël, les E. U. ont toujours promis aux Arabes la création d’un État palestinien libre et indépendant. Hélas, depuis lors, ils se sont contentés de leur donner des mots, rien que des maux, et des calmants dont les effets disparaissent aussi rapidement que possible. Ils leur ont donné les mots comme : Liberté, indépendance, État libre, identité, en même temps ils leur ont confisqué les faits comme : La liberté, l’indépendance, l’État libre et l’identité. Il a fallu une éternité pour que Palestiniens et Arabes comprennent finalement que le mot pomme ne rassasie pas, que le mot peur ne fait pas peur et que le mot souffrance ne fait pas mal, comme promettre n’est pas forcément réaliser ce qui a été promis. Les Palestiniens ont probablement compris, sinon ils doivent comprendre que dire n’est pas forcément faire, loin s’en faut. Les Américains ont acquis l’art de la palabre oiseuse et creuse, ils excellent dans les promesses qui ne peuvent se concrétiser qu’à la saint Glinglin. Ils ont l’art, non de convaincre, mais de persuader en usant de la trique et de la carotte. Pour préserver cet enfant bâtard qu’est Israël, né contre nature, au forceps, dans le désert d’Arabie, ils sont prêts à sacrifier toutes les valeurs, tous les principes, toutes les lois. C’est pour eux le seul moyen de s’implanter définitivement dans le monde arabe pour contrôler et exploiter ses richesses, en même temps pour freiner éventuellement le développement de cette entité humaine qu’ils doivent avoir en horreur. Les Palestiniens ont heureusement compris que dialoguer avec Israël et les États-unis est une perte de temps pour la simple raison qu’un dialogue ou une négociation ne peut jamais avoir lieu entre le loup et l’agneau, l’éléphant et la fourmi. Très vite ce dialogue se transforme en dictées et les négociations en ordres à exécuter. Le moins qu’on puisse dire de ces négociations, c’est qu’elles sont absurdes et ridicules. Car comment espérer un aboutissement logique à des discussions entre Palestiniens et Israéliens, discussions parrainées par les États-unis qui sont à la fois juges et partie, sachant qu’Israël, ce sont les États-unis et les États-unis sont Israël ? L’insolence des Américains, c’est qu’ils exhibent partout des principes humanitaires qu’ils sont les premiers à bafouer. Aux Palestiniens, ils se contentent de donner de beaux mots, de belles phrases, si surdéterminées par des charges sémantiques alléchantes que tout devient suspect. En effet, ils font la liberté pour eux, la servitude pour les Arabes, la démocratie pour eux, la tyrannie pour les Arabes, la prospérité pour eux, la décadence pour les Arabes, en somme la vie pour eux et la Mort pour les Arabes. Heureusement, dans ce monde ici-bas, rien n’est éternel, et si les Palestiniens étaient obligés de se soumettre à leur corps défendant à la volonté des Américains faute de moyens efficaces pour faire entendre leurs droits, ils sont dès lors, grâce à l’environnement politique favorable que connaît le monde arabe, boostés et à la fois condamnés à se manifester comme il se doit sous peine de se faire molester par leur peuple. La seule alternative qui est offerte aux Palestiniens, c’est donc de recourir aux Nations Unis pour mettre définitivement un terme à cette mascarade et mise en scène de mauvais aloi signées sionisme israélo-américain, pour demander la reconnaissance de la communauté internationale, étant donné l’impasse à laquelle ont abouti les négociations avec les Israéliens. Car, rebutés par ce rocher de Sisyphe qui n’offre point de prémices de finitude, ce sera le seul moyen par lequel ils peuvent mettre les Israéliens au dos du mur. Quel tort auraient commis les Palestiniens en recourant à cet expédient pour affirmer leur identité ? La communauté internationale n’est-elle pas invitée à aider ces Palestiniens à réaliser ce vœu somme toute naturel qui consiste à avoir un État indépendant et libre comme tous les autres États de la planète ? Si la plupart des pays du monde font chorus en promettant de reconnaitre l’État de Palestine, les États-Unis, comme à l’accoutumée, sans honte ni vergogne, plus israéliens que les Israéliens eux-mêmes, imbus de leur puissance et de ce droit absurde de veto, n’ont ménagé aucun effort pour essayer de dissuader les Palestiniens d’aller aux Nations Unis. Ils ont menacé de réduire leur aide financière si les Palestiniens ont refusé cette servitude volontaire qu’ils leur ont toujours offerte pour ne pas dire imposée. La communauté européenne malheureusement, jamais libre dans ses positions et attitudes, a emboité le pas aux Américains en cherchant à proposer aux Palestiniens le même abandon et le même opprobre. Ni les uns ni les autres n’ont compris que le changement est fatal, et que camper éternellement, de manière mécanique dans la même position et les mêmes principes, c’est s’exposer fatalement à être la risée de la communauté internationale. Que les Palestiniens et les Arabes prennent une fois pour toute conscience de leur valeur, qu’ils fassent un effort pour retravailler de manière positive leurs cognitions, les réorienter en les débarrassant de ce qui provoquait leurs distorsions afin d’aller de l’avant et arracher à la communauté internationale cette reconnaissance qui a pris du temps à connaitre le monde. Ce sera peut-être le seul moyen d’obliger Israël à arrêter ses appréciations tendancieuses et ses folles provocations, et à comprendre que dorénavant, elle n’aura plus affaire à une Palestine qui se comporte comme un agneau docile et serviable, mais à un lionceau agressif et entreprenant, capable, grâce à la seule force de son esprit, de s’imposer en tant qu’entité complète, prête à traiter de tout et avec tous de pair à compagnon. Le Palestinien n’a plus qu’à réorganiser ses cognitions et ses représentations, qu’à les positiver en voyant l’Israélien et l’Américain non comme ceux-ci aiment à être vus avec leurs valeurs surfaites, mais comme lui, le Palestinien, aime à les voir, dans leur nudité naturelle : des fanfarons, des êtres vils et abjects qui ont toujours employé les méthodes retorses et inhumaines pour se gausser des autres, des sangsues, des nations vampiriques construites sur les ruines d’autres nations massacrées. Par leur volonté de chercher à dissuader les Palestiniens de recourir aux Nations unies afin d’avoir une reconnaissance internationale, les États-unis et Israël y compris, en allant à contre-courant de la volonté universelle, ne font que dévoiler leur véritable nature de nation hors-la-loi qui aura perdu toute sa crédibilité, sinon devant toutes les nations du monde, du moins devant les nations arabes et musulmanes.

Bouchta ESSETTE

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