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La politique de l’absurde
22 février 2011, par Bouchta Essette

On croyait qu’il n’y avait d’absurde que le théâtre. Celui-ci étant un jeu par excellence dans la mesure où l’acteur joue toujours, dans l’espace d’une représentation, à être ce qu’il n’est pas. Par conséquence, un metteur en scène a toujours la liberté d’envisager pour ses acteurs des situations qui soient le plus loin possible de la réalité vécue pour donner la possibilité aux spectateurs de vivre des situations inédites et de ressentir des sensations fortes à même de leur faire apprécier cette activité ludique qu’est le théâtre. Aussi parlait-on du théâtre de l’absurde ce qui est synonyme du théâtre de la dérision. Dès lors, il parait qu’il est aussi possible de parler d’une politique de l’absurde. Celle-ci, se conçoit de nos jours à l’aune du théâtre avec lequel elle partage quelques traits dont précisément le jeu, voire le non-sens, d’où le dénominateur commun entre le théâtre et la politique, et ce commun est justement le mot absurde.

Il serait peut-être absurde de parler de la politique de l’absurde, comme on parle du théâtre de l’absurde. Et pourtant, la politique en tant qu’activité humaine, offre comme trait distinctif et définitionnel tout ce qui peut rappeler le jeu, la jonglerie et le mensonge, ce qui nous a permis de comparer ces deux activités à première vue incomparables. Or qu’est-ce que la politique ? Il serait absurde de tenter de définir ce terme, vu son extension à des secteurs hétéroclites et à des activités diverses. Il y a la philosophie politique, les idées politiques, les partis politiques, les régimes politiques, les sciences politiques, les systèmes politiques, la politique économique, la sociologie politique, l’anthropologie politique, etc. Son éventail est donc si large qu’il serait vain de chercher à l’embrasser dans sa totalité, sinon, en étant trop réductif, on dirait que la politique est tout. Cela est d’autant plus vraisemblable que le mot politique (aussi bien le substantif que le qualificatif) peut être employé dans tous les contextes imaginables, de ce fait, le mot politique devient extrêmement fluctuant, et par voie de conséquence, paradoxalement indéfinissable. Mais pour la commodité de l’analyse et pour simplifier les choses, disons que la politique est l’art de gouverner. Tous ceux qui ont pour mission de diriger des peuples dans des Etats définis font forcément de la politique. On essaiera de démontrer l’absurdité de la politique par l’intermédiaire de deux types de politiques : L’occidentale et l’arabe.

Dire que la politique occidentale, en l’occurrence l’américaine, dans la mesure où celle-ci serait représentative de tout l’Occident, est absurde est peu dire. La politique américaine a toujours adopté à l’égard du tiers monde une politique caractérisée par le mépris, l’arrogance et le complexe de supériorité. Les Etats-unis font, à l’égard de ces pays sous-développés, le contraire de ce qu’ils disent, et disent toujours le contraire de ce qu’ils font. Et c’est cela une des dimensions de l’absurde qui est, a-t-on dit, synonyme du non-sens. Les Etats-unis, qui consacrent des milliards de dollars dans des activités d’espionnage, exhibent la démocratie, l’égalité entre les peuples, l’émancipation des Etats pauvres, cherchant à donner d’eux-mêmes l’image d’une société jouant le bon Samaritain, cela relève du Dire ; D’un autre côté, ils se livrent à des activités les plus ignobles, les plus infâmes qu’on puisse imaginer ; Ils soutiennent comme ils ont toujours soutenu des régimes politiques totalitaires, les tous citer serait fastidieux, on se contente de rappeler les plus significatifs ; Il y a le régime de Pinochet au Chili, celui du Shah d’Iran, DE Hitler de Mussolini, celui de Ben Ali et de Moubarak…, allant ainsi à contre-courant de ce qu’ils allèguent. Les Etats-unis ont, depuis leur naissance, pratiqué une politique de l’absurde, en légalisant l’illégal quand celui-ci va avec leurs intérêts stratégiques, et en dénigrant le légal quand celui-ci va à l’encontre de ces intérêts. Et c’est encore cela une des caractéristiques de la politique de l’absurde. Les Etats-Unis ont toujours pratiqué une politique basée sur l’exercice de la traitrise et de la félonie, aussi bien à l’égard de leurs protégés despotes, qu’à l’égard de l’esprit sur lequel ont été constituées ce qu’on appelle les Nations Unis, et ce au grand mépris des valeurs humaines. Si certains peuvent défendre ce genre de pratique sous prétexte que le pragmatisme autorise tout Etat à défendre ses intérêts, ce pragmatisme (qui est curieusement une philosophie d’origine américaine dont la grande figure est William James) occulte malheureusement un aspect fondamental de la question, à savoir la manière dont on ne dit pas si elle doit être bonne, acceptable ou pas. Pour ces hors-la-loi, tout ce qui est utile est bon. Ce machiavélisme est l’essence même de la politique américaine qui ne reconnaît ni ami, ni partenaire, ni légalité ou légitimité, rien en dehors de ses intérêts stratégiques qui se résument dans l’exploitation des biens de la planète et l’exportation d’une philosophie absurde qui veut instituer ces Etats-unis comme le maitre incontesté de la planète. Pour toute âme récalcitrante, il n’y a qu’à voir à quel point le gouvernement d’Obama a fait une démonstration d’un cynisme dont seul un Etat voyou peut se prévaloir. En effet, il paraît qu’il n’y a pas un seul être humain dans ce monde ici-bas qui puisse avoir le courage de dire non à la liberté, qui puisse soutenir l’esclavagisme et l’extermination de la race humaine. La dimension axiologique universelle de ces concepts interdit à toute âme sensée de refuser leur bien-fondé. Si tous les humains communient donc avec les mêmes principes universellement admis, les politiciens américains, comme une corde mal réglée dans un violon, sonnent faux, font couac. Cela s’est passé quand tous les Etats membres du conseil de sécurité, qui avaient décidé de condamner la politique expansionniste de l’Etat d’Israël à Jérusalem-Est sous domination coloniale, ont vu la représentante des Etats-unis brandir ce geste absurde et cocasse que les Etats lèse humanité appellent veto. Faut-il rappeler que ce geste à l’encontre des Arabes, les Etats-unis l’avaient toujours brandi pour prémunir Israël contre les condamnations internationales ?

Quant à La politique arabe, elle assure son lot de l’absurde par des pratiques enfantines et inconcevables qui poussent l’individu le plus désintéressé à s’interroger sur la qualité intellectuelle aussi bien des dirigeants palestiniens que de ceux du reste du monde arabe. Qu’y a-t-il de plus absurde que d’accepter que les Américains puissent être les partenaires des pourparlers qui ont lieu entre les Juifs et les Palestiniens ? Ces Américains peuvent–ils être à la fois adversaires et arbitres ? Peuvent-ils donner raison aux Palestiniens aux dépens d’eux-mêmes ? Car les Américains, ne sont–ils pas des Juifs, et les Juifs, ne sont-ils pas les Américains ? Ces derniers ont-ils jamais caché leur soutien inconditionnel et indiscutable à Israël qui n’est rien d’autre qu’un Etat américain d’outre-mer ? Les Palestiniens et avec eux les Arabes, ou bien ils sont FOUS ou bien ils sont TARÉS, voilà pourquoi dans l’un comme dans l’autre cas, ils sont forcément des fous tarés. Certes, les Arabes qui comptent des centaines de millions avec des ressources immenses de tous genres ne finissent jamais de nous surprendre par des attitudes politiques cocasses et absurdes. En effet Israël les a toujours bernés par des promesses qu’elle n’a jamais honorées, et nos dirigeants arabes, absurdement, ont toujours menacé d’appliquer leur principe stratégique pour résoudre le conflit arabo israélien, à savoir leur attachement à la paix. Le mieux qu’ils puissent faire est donc de scotomiser de leur esprit tout ce qui s’appelle Etats-unis et de se préparer sérieusement à la guerre si vraiment ils ont envie de faire la paix.

L’autre exemple, non moins cocasse dans la politique absurde est ce qu’un observateur commun peut lire dans ce qui s’est passé ces derniers jours dans le monde arabe. Si Ben Ali a été surpris par les Révolutionnaires qui lui avaient tout de même laissé le temps de prendre la poudre d’escampette, Moubarak, qui avec un minimum d’esprit aurait pu éviter les bêtises que son prédécesseur avait commises. Malheureusement, tout stupide et entêté qu’il était, il avait toujours réagi derrière les événements et jamais devant, pour dire ce qu’il ne fallait pas dire et ne pas faire ce qu’il avait fait. Ces imprudences conjuguées lui ont valu un départ moins spectaculaire, certes, que celui de Ben Ali, mais tout autant dégradant et déshonorant. Pire encore, et il semble que chaque fois qu’une tête arabe a été décapitée, il nous a, aura été donné à voir combien ces dirigeants pour lesquels leur peuple devait avoir de l’estime, voire de l’admiration se révèlent en fin de compte n’être que de pantins ou des cabotins tarés et ridicules, tant leurs dires et leurs faire nous reflètent clairement la véritable nature de leur personnalité. Ce sera le cas du Zaim ou du Caïd ou du Roi des Rois des Africains, son excellence M. Kaddafi, qui comme s’il n’avait pas été sur terre ces dernières semaines (et il parait que c’est bien le cas, lui le personnage lunatique), comme s’il n’avait pas vu ce qui s’est passé successivement en Tunisie et en Égypte va reproduire, encore une fois de plus, les mêmes insanités déjà constatées dans les deux autres régimes déchus. Car au lieu de chercher à prévenir le pire par des actions appropriées, il a préféré faire confiance en sa nature, ce qui est du reste louable. Malheureusement, il a une nature si complexe, si impondérable qu’il a surpris, encore une fois, tout le monde par ses démonstrations rocambolesques. La première est qu’il a endossé la livrée d’un adolescent pour sortir un soir prendre part avec ses pairs aux manifestations soutenant leur Zaim, c’est-à-dire pour se soutenir lui-même. D’aucuns affirment l’avoir entendu répéter en chœur avec les autres un seul et orphelin slogan, mais ô combien symptomatique : « Dieu, Mouammar, la Libye et c’est tout ».

La seconde démonstration encore plus fantaisiste est celle dont il a fait montre quand, pris par le temps, alors que la révolution battait son plein, se répandant partout dans la terre libyenne, Kaddafi a préféré, ce qui était d’une grande sagesse, (dans la mesure où son éloquence est inintelligible pour le commun des mortels) envoyer son fils lire à sa place un discours dont il avait été inspiré, à l’attention de son peuple. Inutile de s’arrêter sur cette délégation de pouvoir. Car quand Son fils s’adresse sur l’antenne de la télévision aux Libyens, les observateurs sont incapables de comprendre en quelle qualité il s’est arrogé le droit de le faire. On ne peut même pas parler d’un vice de forme comme il arrive souvent de le constater dans les tribunaux, ces vices au moins émanent d’un organisme légal comme le corps judiciaire (juges, avocats). Or ce que démontre Kaddafi-fils est pour le moins une pratique qui prouve combien le régime autoritariste de ce potentat se permet toutes les folies, considérant le pays comme une réserve familiale dans laquelle le père tout comme le fils, la mère, le cousin et la cousine, l’oncle et la tante, tous sont habilités à mette la main à l’ouvrage, chacun selon ses imbécilités ou ses folies. Dans cette logique familiale, il ne serait pas surprenant de voir un quidam s’amenant à la télévision pour dire qu’il est le cousin du petit-fils de l’oncle du berger de l’ami du berger de Kaddafi, et qu’il a un petit mot à dire , en direct, au peuple libyen. Dans ce contexte absurde, une concubine de Kaddafi ou de son fils ou de l’ami de son fils, pourvu qu’il y ait un quelconque rapport de parenté pour prétendre à ce genre de prérogative.

Le contenu du discours de Kaddafi fils est un système de contradictions et d’absurdités. Cela n’est guère étonnant quand on sait qu’il s’est abreuvé de l’idéologie kaddafique qui a pour soubassement des constructions oxymoriques, des allégations fantasques, des folies de tous genres. L’orateur, malgré quelques tics qui rendent son discours inintelligible, parvient tout de même à se faire comprendre. Pour celui qui a envie de comprendre facilement ce qu’on peut appeler un « discours absurde », il trouvera bien une illustration éloquente dans le galimatias kaddafique. Rappelons que le contexte temporel est malheureusement inapproprié. Ce discoureur malgré les Libyens a mal choisi le temps de son intervention, car elle est survenue quand les dés étaient jetés, quand ses Baltagias africains qu’il avait payés ont semé la terreur et le sang dans les rues. En d’autres termes, ce discoureur est intervenu en fait pour sauver les meubles qui n’ont pas encore pris feu, pour tenter une démarche désespérée, voulant regagner la sympathie du peuple définitivement perdue, tout en étant prêt à concéder dollars et privilèges politiques, ou de toute autre nature pour recouvrer un pouvoir qui lui file imperceptiblement entre les doigts. Kaddafi fils, sachant que tout est perdu, désespérant toute possibilité de réconciliation avec un peuple qui a pris sa décision (en effet, quand un peuple a pris une décision, elle devient irrévocable), il perd la tête, et c’est le délire caractérisé.
Kaddaffi-fils passe à l’intimidation feutrée, puis à la menace directe en usant de ce qu’on peut appeler des expériences de pensée. Si vous voulez sauver votre vie, il y a une seule condition : Vous en remettre à la volonté des Kaddaffis. Dans le cas contraire, il donne libre cours à son imagination pour enfanter des situations inédites, des scènes tragiques, comme si lui et son père étaient la providence. Et donc s’il arrivait à cette providence de s’esbigner, alors les Libyens sont tout simplement condamnés à une perdition tragique et fatale. Dans ce cas des Etats islamiques émergeraient, les guerres tribales éclateraient, et l’Occident n’accepterait jamais un Etat islamique dans un pays qui repose sur un grand lac de pétrole, tout comme il ne l’a pas accepté en Somalie et en Afghanistan. Et si cela se faisait, que le peuple s’attende à voir les Occidentaux les envahir pour les asservir en les privant de leurs richesses. Dans ce cas, plus de soins, plus d’enseignement et d’école, plus de pain, l’inflation serait fatale, en somme ce sera la catastrophe pour les Libyens dont ils ne pourront pas se relever de sitôt. Kaddaffi-fils a été clair : ou lui et les siens, ou ce sera la terre brulée, car il ne permettra à personne de lui prendre SA Libye. En somme, ce discours devait être lu comme une déclaration de guerre.

Pour une fois, Kaddafi-fils aura malheureusement tenu sa promesse. Il passe du dire au faire en entamant un massacre systématisé des civils au moyen de bombardements aériens, faisant ainsi des centaines de victimes. Cela se passe devant une société humaine criminellement muette.

Rappelons que cette intervention télévisée a signé la fin de son père en tant que Zaim et Caïd. Le fait qu’Il se soit volontairement relégué au second rôle peut être lu comme une prémonition qui annonce sa disparition imminente, et partant l’écroulement d’une Jamahiriya qui aura vécu une quarantaine d’années. Mouammar a été président de la Libye. Étant atteint, lui et son fils, d’une aliénation mentale, le tandem nécessite un internement et une cure psychanalytique et psychiatrique avant d’être déférés devant un tribunal national pour crime contre le peuple libyen.

Bouchta ESSETTE

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