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« Credit Crunch » : comment en est-on arrivé là ?
13 octobre 2008, par Philippe Nadouce

« Credit Crunch » : comment en est-on arrivé là



La question n'est pas sur toutes les bouches, bien évidemment. Ceux qui depuis les années 80 ont servi les architectes de l'idéologie néolibérale –ils sont plus nombreux qu’on le croit- connaissent la réponse et craignent aujourd’hui qu'elle s'ébruite. Pourtant, depuis le début du mois d’octobre 2008 – un automne qui restera dans les annales du capitalisme moderne- les « lundis noirs » et les « vendredis de nationalisation » repoussent chaque fois un peu plus loin dans l’inconnu le destin du modèle économique qui a salué les excès de la finance et de l’individualisme au risque de mettre la démocratie en danger.


"Casino Capitalism"

Les coupables aujourd'hui se taisent, ou bien, comme M. Brown, M. Bush, M. Sarkosy et leurs cliques, essayent de sauver les meubles à coups de nationalisations! Hélas pour eux - et bientôt pour nous!- le navire continue de sombrer et rien ne semble assez bon pour lui faire redresser le nez.

Alors, qui sont-ils, ces coupables? Les banquiers et les financiers anglo-saxons? Oui, bien sûr, mais derrière eux se dressent les élites politiques et économiques des nations industrialisées qui nous ont imposé la déréglementation des marchés financiers et de l'économie, la liquidation de l'état -qui "
allait nous mener à la ruine", disaient-ils et qui aujourd'hui se trouve être le seul garant de notre avenir-, les délocalisations vers des pays sans démocratie où l’on peut aisément trouver une main d’oeuvre docile et bon marché, les énormes déficits, la distribution de bénéfices faramineux aux actionnaires, au détriment de l'investissement dans l'appareil de production, la présence toujours plus sujette à caution des paradis fiscaux, et pour finir l'intense travail de propagande des médias et leur "pensée unique" matraquée en boucle sur les chaînes de télévision et dans les journaux.

C'est en fait tout un système qui nous a amené au bord du gouffre! Une idéologie basée sur l'idée absurde que les marchés peuvent se réguler seuls, sans aucune intervention et surtout pas celle de l'état. Pourtant, dès le début des années 80 des économistes comme John Eatwell et Lance Taylor avaient averti des dangers d’un marché financier qui systématiquement sous-estimait les risques qu’il prenait et qui était d’une remarquable incompétence quand on luidemandait des explications concrètes sur les produits qu’il mettait en ventes sur les marchés internationaux. Mais toutes les solutions qui à l’époque et pendant ces 30 dernières années furent proposées pour y remédier ont été ignorées.

Une idéologie donc, qui derrière ses beaux discours sur le "changement" et la "modernité", s'est patiemment livrée à une formidable entreprise de "restauration" d'un ordre ancien. La plus belle place y est réservée à une classe avide dont les idéaux extrémistes et anti démocratiques placent l’acquisition du profit avant les droits de l’homme.


L'Angleterre, une nation de banquiers!

La nouvelle tombait mercredi 8 octobre 2008, Gordon Brown venait de nationaliser en partie l'industrie financière anglaise poussant ainsi ses collègues occidentaux à faire de même ! Le G8 se réunissait à la fin de la même semaine après quelques jours de panique sur les places boursières du monde entier. Les pertes étaient colossales !

« Nationalisation ! » ce concept tabou depuis 30 ans était soudainement devenu un mot d’ordre chez les maîtres du monde ! On croit rêver !


Ceux qui, à peine six mois auparavant, avaient crucifié Gordon Brown et Alistair Darling, son ministre des Finances, pour avoir eu l'audace de nationaliser la banque en faillite Northern Rock (Cf. article du même auteur, intitulé:"Autant en emporte la banque"), ceux-là mêmes, se traînaient maintenant devant eux, les suppliant de « socialiser » le reste des banques anglaises en semi faillite! Le monde à l'envers! La City était devenue "communiste" et, beaucoup plus fort encore, c'est elle qui avait supplié de le devenir! Dans leur hâte, ces bolchéviques en costume trois pièces oubliaient qu'ils allaient faire les frais de leur irresponsabilité en perdant leur bonus faramineux et leurs privilèges! Mais surtout, les classes politiques qui jusqu'à présent les avaient protégés n'allaient pas tarder à se retourner contre eux.


Le contribuable, une fois de plus, se voyait jeter en pleine figure le vieil adage néolibéral: "Privatisation des bénéfices et nationalisation des pertes". C'est par cette petite phrase que les plus grosses fortunes françaises actuelles ont acquis frauduleusement leurs milliards! Piocher dans les caisses de l’état est en effet chose commune. Le dernier exemple en France est celui de Bernard Tapie qui s’est vu grassement remercié pour ses services.


Et comme le fait remarquer très justement Noam Chomsky dans un article publié dans « The Irish Times », cette nationalisation des pertes au profit de quelques-uns est assez courante. Selon Winfried Ruigrok and Rob van Tulder, deux économistes qui ont étudié le phénomène il y a quinze ans, une vingtaine de grandes entreprises américaines classées dans Fortune 100 n’auraient pas pu survivre sans l’aide de leur gouvernement, à qui elles avaient demandé de « socialiser leurs pertes ». Les bénéfices correspondants, on s’en doute, ne tombèrent pas dans les poches du contribuable...


De telles interventions gouvernementales –on se rappelle du crédit lyonnais en France et avant cela, de l’industrie sidérurgique, dont la famille de l’ex patron des patrons, Ernest-Antoine Seillière, est l’une des heureuses bénéficières - ont « été la règle plutôt que l’exception au cours des deux derniers siècles ».

Ils concluent leur étude en disant : « Dans une démocratie digne de ce nom, une campagne politique aurait mis ces problèmes sur la scellette, aurait dévoilé leurs causes profondes et aurait offert quelques solutions. »


Londres, le 12 octobre 2008




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