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Sept ans
11 décembre 2005, par Annah Nazareth

C’était un jour gris ; un de ces jours où le ciel est tellement épais qu’il s’affaisse sur les toits, qu’il dégouline sur les façades et qu’il vient s’appuyer sur tes épaules.
Et toi, tu marches avec ça sur le dos et même quand il y a une éclaircie, même quand tu vois des morceaux de ciel bleu, tu continues de marcher comme si tu traînais encore le ciel de ce jour là ...

C’était un jour gris …

Moi, j’étais dans la chambre, ma mère à la cuisine quand mon père est entré en criant : « Salauds, putains de flics m’ont chourré la bagnole ! »

Enfin… je crois bien que c’était ce qu’il disait et il a donné un grand coup de poing sur la table. Ma mère s’est mise à crier aussi : " Mais tu es saoul ! Complètement bourré !"

Mon père a crié encore plus fort : « J’t’emmerde toi et ces pourris de flics.!"

Et ma mère a continué : « Ah ! Ils t’ont sucré le permis, c’est ça !Hein ! Et comment tu vas faire pour aller travailler demain ? Réponds ! »

Alors, mon père s’est mis à rire, mais ce n’était pas un joli rire et il parlait en même temps : « Et alors… j’irai pas ! Où est le problème ? Où t’as mis le whisky ? »
Il se cognait à la table, aux chaises, il claquait les portes du bahut, des tiroirs et il criait de plus en plus : « Où t’as planqué le whisky ? Y restait du whisky et où tu l’as encore planqué ? »

Et ma mère,elle, ne bougeait pas : elle était debout, devant l’évier, avec un saladier à la main. Elle regardait mon père et elle criait presque aussi fort que lui : « Y a plus de whisky ! Comment tu vas faire pour aller travailler ? Comment tu vas faire pour aller travailler ? »

Là, mon père s’est redressé, il s’est appuyé sur la table et il a fait un silence comme s’il réfléchissait et puis il a dit : " « Tu iras toi ! Travailler ! Tu vas te mettre au tapin et on va pouvoir bouffer et moi, je vais pouvoir roupiller, voilà, demain tu vas aller au tapin ! Putain ! AU TAPIN ! »

Et il répétait en chantant cette chanson qui n’était pas gentille « Putain au tapin, Putain au tapin »…

Ma mère l’a insulté, elle lui a dit de tout et elle a lancé le saladier dans la pièce et elle criait toujours : « Fous le camp ! Dégage ! Ivrogne ! Fous le camp ! »

Mon père s’est mis en colère parce qu’elle avait cassé le plat ou parce qu’elle l’avait insulté, je ne sais plus et il l’a frappé , ma mère a frappé aussi ; ils se sont bagarrés, ma mère est tombée et mon père a continué ...

Ma mère est morte à coups de poings et à coups de pieds et moi, moi, je n’ai rien dit ..... J’avais sept ans.

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